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Laurent Mosar (Député) : Défis et opportunités au luxembourg

Laurent Mosar, député, conseiller communal et avocat, partage ses vues sur la régulation bancaire, l’opportunité manquée avec Revolut et les sanctions financières qui façonnent la réputation du Luxembourg.

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©360Crossmedia

Que signifie l’amende de 25 millions d’euros infligée à Rothschild pour la place financière luxembourgeoise ?
Cela pourrait représenter une mauvaise nouvelle pour Rothschild, mais je considère que c’est une excellente nouvelle pour le Luxembourg. Cette affaire marque un tournant : c’est la première fois qu’une grande banque internationale reçoit une sanction aussi importante dans le pays. Pendant des années, certains critiques affirmaient que le Luxembourg excellait à transposer des règles sans jamais passer à l’action. Ce jugement prouve le contraire. Il montre que la responsabilité s’applique à tous les acteurs du secteur financier, quelle que soit leur taille ou leur prestige. La justice a fait son travail sans exception. Cette décision renforce la confiance dans le système. Une réputation solide repose non seulement sur le respect des règles, mais aussi sur leur application crédible. Lorsqu’un pays inflige une amende de 25 millions d’euros à une banque de renom, cela envoie un message fort : personne n’échappe à l’examen. Les places financières doivent non seulement suivre les règles, mais aussi démontrer la volonté et la capacité de sanctionner les manquements. Ce jugement prouve que le Luxembourg sait agir avec fermeté. Je me félicite de cette évolution et reste reconnaissant envers le système judiciaire pour son rôle dans la préservation de l’intégrité de notre secteur financier.

Pourquoi Revolut a-t-elle préféré Paris au Luxembourg, et quelle leçon en tirer ?
Il est encore difficile de savoir ce qui s’est exactement passé lorsque Revolut a approché les autorités luxembourgeoises. Ils ont envisagé d’implanter une activité ici et ont engagé des discussions avec la CSSF. Finalement, ils ont choisi la Lituanie pour obtenir leur licence. Plus récemment, Revolut a annoncé un investissement d’un milliard d’euros en France. Cette annonce a suscité de nombreux messages demandant pourquoi le Luxembourg n’avait pas su saisir cette opportunité. Revolut fonctionne pourtant très bien ici, avec 75 000 détenteurs de compte, et une croissance qui pourrait atteindre les 100 000 d’ici la fin de l’année. Le marché luxembourgeois demande clairement des services bancaires modernes. Le Luxembourg a manqué une occasion. Je ne pense pas que la CSSF soit en cause ; elle a fait son travail. Mais les responsables politiques doivent s’interroger : pourquoi Paris a-t-elle été plus attractive ? La question mérite d’être posée. La réflexion stratégique sur les investisseurs de demain et l’évolution des fintechs ne doit pas se limiter à des considérations réglementaires. Il s’agit aussi de positionnement, de vision et d’ambition. Quand un acteur majeur choisit une autre capitale malgré son succès local, il faut comprendre pourquoi, et comment éviter que cela ne se reproduise. Je trouve ce développement frustrant.

"Les banques doivent servir l’économie dans son ensemble, et non uniquement la recherche de profits maximaux."

Comment remédier au problème croissant de l’accès bancaire au Luxembourg ?
Depuis plus de deux ans, je défends le principe selon lequel toute entreprise doit pouvoir ouvrir un compte bancaire. La situation ne s’améliore toujours pas. Certaines banques invoquent une surrèglementation qui les obligerait à restreindre l’accès, mais d’autres facteurs peuvent entrer en jeu. ING, par exemple, a fermé des milliers de comptes, obligeant de nombreux entrepreneurs à chercher des alternatives. Les initiatives existantes de la CSSF, de l’ABBL et du gouvernement restent insuffisantes. Récemment, j’ai partagé sur LinkedIn une lettre du ministre néerlandais des Finances appelant les banques à adopter une approche purement basée sur le risque. Le Luxembourg pourrait adopter la même logique. La plupart des clients ne présentent pas de risques. Les banques doivent servir l’économie dans son ensemble, et non uniquement la recherche de profits maximaux. Une économie fonctionnelle ne peut tolérer que des startups, des indépendants ou des fonds n’aient pas accès aux services bancaires de base. Le problème dépasse le cadre de l’innovation : il touche le quotidien des affaires. Si les banques tournent le dos aux acteurs économiques, les conséquences vont bien au-delà du simple désagrément. Le ministre Roth, pour qui j’ai beaucoup d’estime, devrait envisager de rédiger un message similaire à destination de nos banques nationales, afin de les inciter à adopter une attitude plus ouverte et pragmatique en matière d’accessibilité bancaire.

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