Philipp von Restorff (Institut Luxembourgeois des Administrateurs) : Une réglementation solide, à quel prix ?
La réglementation se durcit depuis que la gouvernance financière a montré ses failles. Philipp von Restorff, CEO de l’Institut Luxembourgeois des Administrateurs, défend la nécéssité pour le Luxembourg d’adopter une plus grande transparence et de consolider son cadre réglementaire malgré les inquiétudes concernant le coût de telles mesures et le risque d’affaiblir la compétitivité internationale du Duché.
"La mise en place d’un cadre réglementaire solide a un prix."
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Comment le Luxembourg aborde-t-il l’équilibre entre besoin de restaurer la confiance dans la gouvernance et crainte d’un excès de réglementation ?
Les questions de gouvernance restent d’actualité. D’un côté, nous voyons de grands acteurs de la finance payer le prix de leurs erreurs passées. De l’autre, nous entendons les craintes des fournisseurs de services financiers de voir leur activité freinée par des exigences de conformité excessives. Or, les deux questions sont liées. Depuis la crise financière de 2008, le renforcement – nécessaire – du cadre réglementaire s’accélère. Cette complexification représente des coûts opérationnels énormes pour les organisations. Dans le même temps, nous ne devons pas oublier que le Luxembourg a été dans le viseur des organismes réglementaires internationaux. Le Duché doit assurer sa conformité ; les organisations n’ont pas droit à l’erreur sur ce point.
Craignez-vous que la transparence et l’amélioration de la gouvernance rendent le Luxembourg obsolète sur la scène internationale ?
Le Luxembourg a affiché sa volonté politique d’améliorer la transparence et de renforcer son cadre réglementaire. Certaines personnes craignent que nous perdions notre pertinence sur la scène internationale en raison du coût élevé de la mise en conformité. C’est un fait : la mise en place d’un cadre réglementaire solide a un prix. Et non, je ne crains pas que nous mettions la clé sous la porte pour autant. Les coûts augmentent en effet, et nous devons nous assurer de rester compétitifs. Pour autant, je trouve intéressant d’apprendre que le Luxembourg est sous les projecteurs internationaux, car le GAFI vient d’accorder une note élevée au pays dans sa dernière évaluation. J’estime donc que nous cheminons dans la bonne direction.
Quels problèmes de gouvernance se profilent à l’horizon ?
Depuis les dernières élections, nous abordons avec le gouvernement des sujets d’actualité, comme les problèmes de TVA actuels des administrateurs et la directive ATAD 3, mais également des questions de gouvernance d’entreprise au sens large, au-delà de l’aspect financier. En outre, nous formons des administrateurs dans d’autres domaines pour qu’ils soient au fait des dernières évolutions réglementaires et des connaissances nécessaires. Nous abordons également d’autres problématiques plus générales, comme les suites de la pandémie de Covid ou de l’invasion de l’Ukraine – source de tensions géopolitiques –, mais aussi la montée de la cybercriminalité et l’intelligence artificielle. Tous ces facteurs impactent les organisations, surtout si elles opèrent à l’international.