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Joachim Boudens & Gert De Mangeleer (Hertog Jan) : Les délices de la co-création

Dans la grande ferme rénovée, Andy est accueilli pour une dégustation dépaysante. Rencontre et interview avec Joachim Boudens.

 

Vous avez été sacré meilleur sommelier de Belgique en 2004, est-ce que l'oenologie fait toujours partie de votre quotidien ?

En effet, la sommellerie a occupé une grande place dans ma vie, mais aujourd’hui, mon temps se partage entre le management, le marketing et la communication. Mon expérience me permet de remplacer n’importe qui, n’importe quand. Mon Sommelier Dries Corneillie a pris les commandes et cela me permet de me concentrer sur tout ce qui se passe en salle. J’ai plaisir à discuter avec les clients en servant le vin, la passion reste intacte. Chaque instant doit se déguster.

 

Comment est née cette passion du vin ?

Plusieurs personnes de ma famille ont fait l’école hôtelière. Mon oncle partageait avec moi ses combines, j’ai donc commencé à collectionner les étiquettes de vin pour avoir de l’avance sur mes camarades. Je ne savais absolument pas à quoi correspondaient tous ces noms, même si mon grand-père gardait de grandes bouteilles dans sa cave. L’école m’a inculqué toutes ces connaissances. Ensuite, Patrick Devos – restaurant gastronomique à Bruges – m’a laissé ma chance pendant un an et demi. Mon ambition m’a mené dans un restaurant deux étoiles : le ‘t Molentje et à faire des concours dont celui de 2004.

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Comment avez-vous recontré Gert ?

Il était sous-chef au ‘t Molentje en 2000, depuis nous passons la majorité de notre temps ensemble. Nous avons mangé dans des centaines de restaurants, il s’agit d’une amitié durable. En 2005, les rumeurs ont

commencé à circuler au sujet de notre première étoile. Nos concurrents obtenaient leur étoile les uns après les autres, nous étions frustrés. En novembre, le Guide Michelin s’est décidé et ce fut un vrai déclic : la clientèle, les recettes, notre identité et les équipes ont changé. Nous avons obtenu la deuxième étoile en 2010 et ainsi démarrait la course à la troisième. Nous approchions enfin de notre but ultime. La ferme nous a fortement aidé en ce sens, c’est un bâtiment protégé où tout est d’origine. La troisième étoile nous a été accordée et ce fut comme gagner une médaille d’or aux Jeux Olympiques !

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Les prochains objectifs de votre duo ?

Faire mieux qu’hier, toujours. Intégrer à nos menus de nouvelles idées que ce soit ici, ou dans notre bistrot LESS (Love Eat Share Smile, ndlr), situé juste à côté. Cela fait aujourd’hui 15 ans que nous dégustons des mets à travers le monde, je suis parrain de sa fille, nous nous amusons toujours autant. Tout a été créé à deux, lui côté cuisine, moi en salle. Nous défendons nos deux professions mais nous sommes très complémentaires.

 

Qu'aimeriez-vous que les gens retiennent de leur visite ici ?

La cuisine de Gert est singulière, très personnalisée. La simplicité n’est pas simple : tous les éléments doivent être harmonieux : cuisine, service, environnement, architecture, musique, etc. Les gens doivent repartir en étant détendus, comme s’ils revenaient de voyage. Le jardin y contribue, nous invitons les gens à le visiter ainsi que les cuisines. Le luxe ne réside pas seulement dans les belles voitures ou les objets. La détente est un luxe.

 

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Interview de Gert De Mangeleer : La simplicité n'est pas simple

Entre deux allers-retours en cuisine, le talentueux chef accorde quleques minutes à Andy dans les coullisses de son restaurant trois étoiles. Rencontre avec le jeune et conquérant Gert De Mangeleer.

 

Pourquoi avoir choisir ce lieu insolite ?

Cette ferme représente l’un des plus beaux coups de cœur de ma vie. Lors d’un footing, j’ai vu une femme poser le panneau
« À vendre ». Le téléphone de Joachim a sonné dans la foulée et il est arrivé dix minutes après pour voir cela de ses propres yeux. Il a ressenti la même chose que moi, il fallait l’acheter. Deux semaines après, la ferme nous appartenait, mais tout restait à faire ! Par ailleurs, notre but a toujours été de cultiver nous-même nos fleurs, légumes et herbes, c’était donc le lieu parfait. Aujourd’hui, la terrasse donne sur 2 hectares de terres cultivables. Nous collectionnons 600 produits di érents, y compris le poisson et la viande. Je pense qu’il s’agit là de notre principale di érence : ce style se concrétise dans notre cuisine. Ce jardin renferme des secrets que tous les autres ignorent : il constitue notre identité, notre signature.

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Quand avez-vous commencé à cuisiner ?

Je veux devenir chef depuis l’âge de 12 ans. Mes parents souhaitaient cependant que je termine ma scolarité. Ils jugeaient important d’avoir une base solide et la connaissance des langues pour la suite. Lejourdemes18ans,jene savais pas encore exactement si je comptais aller à l’université ou en école hôtelière. Finalement, j’ai entrepris des études d’architecte. Malgré cela, je n’avais encore pas encore de déclic. Mes parents ont reçu un appel assez rapidement leur annonçant que je revenais par le prochain train pour m’orienter vers une école hôtelière. À l’époque, je ne rêvais pas de trois étoiles au Guide Michelin, à vrai dire, je ne connaissais pas son existence. Mes idées s’orientaient plutôt vers un jazz bar où les gens pourraient déguster de la viande grillée en écoutant de la bonne musique. Lors de mon premier stage – dans un étoilé Michelin – j’ai compris : je voulais travailler de cette façon.
 

"Ce jardin renferme des secrets que tous les autres ignorent, il constitue notre identité, notre signature."

Gert De Mangeleer

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D'où viennent toutes ces inspirations ?

Je voyage beaucoup, mais partout, la nature m’inspire. Je trouve mes idées en me promenant dans des jardins, en courant dans les forêts du Plat Pays. Les voyages me permettent d’assembler tous ces produits. L’Asie reste une de mes destinations favorites. J’admire la pureté avec laquelle les japonais cuisinent. Notre originalité réside dans cette combinaison entre les inspirations lointaines et la cuisine locale. Mes inspirations viennent également de l’art et l’architecture, avec des artistes comme Mark Rothko par exemple ! Bien sûr, aussi de certains chefs pour lesquels j’ai énormément de respect : Michel Bras ou Ferran Adrià. Mais d’un autre côté, j’étais à Naples récemment et j’ai mangé les meilleures pâtes du monde faites par une pure inconnue, une vraie « mama ». La nourriture que vous trouvez dans la rue à Hong-Kong est invraisemblable elle aussi. Ces inconnus là sont des artistes. Il faut arrêter de faire du beau mauvais. Croyez-moi, certaines assiettes que j’ai pu goûter étaient immondes, mais délicieuses ! ​

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